L'adaptation
cinématographique de Bertrand Tavernier est une très bonne
surprise, fidèle à la bande dessinée de Christophe Blain et Abel
Lanzac. Le passage de la case à l'écran est une vraie réussite !
Tout y est :
l'humour des dialogues, la mise en scène (les portes claquent et les
feuilles volent comme dans la BD) et les trois acteurs principaux
sont épatants (Thierry Lhermitte, Raphaël Personnaz et Niels
Arestrup).
Le travail d'Arthur
Vlaminck, jeune employé du Ministère des Affaires étrangères,
sera à l'image de son arrivée au quai d'Orsay :
labyrinthique ! S'il peine à suivre le laquais dans le dédale
du ministère, sa fonction de chargé des langages sera, elle aussi,
semée de circonvolutions.
Inspiré de Dominique de
Villepin, le ministre Alexandre Taillard de Vorms est, comme dans la
BD, un personnage bourré de contradictions fort attachant. Actif
impulsif, tour à tour brillant et trivial ; comme Arthur
Vlaminck, on a du mal à suivre le cheminement réflexif du ministre.
Arthur doit rédiger le
discours qui sera prononcé au Conseil de sécurité des Nations
unies le 14 février 2003. Très vite, la tâche se révèle très
ardue tant les consignes et les idées fixes du ministre se
contredisent : « faire et défaire, c'est toujours
travailler » ! Comment injecter de la philosophie dans un
discours politique ? Citer Héraclite, mais à bon escient !
On pourrait croire que
l'ambiance est délétère au sein du Ministère, mais même si on
n'est jamais à l'abri d'un « coup de pute », d'un
déjeuner sur le pouce ou du burn-out, on
sait prendre du recul avec des chansons triviales, des jeux de mots
ou des fous-rires ! Le candide Arthur va en faire les
frais !
Tout le potentiel comique
du film repose sur le personnage du ministre, ses lubies et ses accès
de colère. On atteint l'apogée dans la scène où il se plaint des
Stabilo qui peluchent !
Enfin, le film nous
permet d'entrer dans les coulisses d'un ministère, où évoluent ,
autour du ministre – qui n'est en réalité qu'un personnage de
représentation - le chef de cabinet et les conseillers. Comme dans
la BD, l'adaptation cinématographique, ose désacraliser la
politique sans pour autant en occulter la complexité et le
dévouement qu'elle exige. D'Héraclite à Hergé, ce qui est sûr,
c'est qu'elle est beaucoup plus légère quand on y injecte de bons
mots !
Voir mon billet de 2010 sur le tome 1 de la BD.